Je fais ici une analyse du bilan national que l'on peut tirer des résultats du Front de Gauche (FdG) au premier tour des élections régionales de mars 2010. Je détaillerai plus tard au niveau des régions.
La première remarque est que le FdG est en progression par rapport aux résultats des européennes de juin 2009, la seule élection à laquelle il avait jusque-là participé. Il avait en effet alors obtenu 1,04 million de voix au niveau national contre 1,13 million aux élections régionales. Cette hausse limitée en nombre de voix se traduit par une baisse en pourcentage des exprimés de 6,05 % à 5,84 %. Dans les deux cas, il faut relativiser les chiffres puisque la participation, bien qu'exceptionnellement faible pour des régionales, était supérieure à celle des européennes (de 40,6 à 46,3 % de votants). Surtout, les résultats du FdG aux régionales obtenus sur 17 régions (22 en métropole) sont rapportés aux chiffres nationaux, ce qui sous-estime clairement le poids de l'alliance dans les régions où elle était présente.
Voici les résultats détaillés du Front de Gauche, représentés sur la carte ci-dessus :
Plus de 10 % : Auvergne (14,24 %), Nord-Pas-de-Calais (10,78 %), Corse (10,02 %) et Limousin, en alliance avec le NPA (13,13 %).
Plus de 5 % : Haute-Normandie (8,39 %), Centre (7,53 %), Midi-Pyrénées (6,91 %), Ile-de-France (6,55 %), Rhône-Alpes (6,31 %), PACA (6,11 %), Aquitaine (5,95 %), Picardie (5,35 %) et enfin Languedoc-Roussillon (8,59 %) et Pays-de-la-Loire (5,00 %) en alliance avec le NPA.
Moins de 5 % : Poitou-Charentes (4,66 %), Franche-Comté (4,05 %) et Alsace (1,86 %).
Au niveau des départements, on peut tirer plusieurs constats.
Le Front de Gauche dépasse la barre des 10 % dans 11 départements (2 de plus qu'aux européennes) et dépasse les 15 % dans le Puy-de-Dôme (aucun aux européennes). A l'inverse, il ne dépasse plus les 7,5 % que dans 13 départements (20 aux européennes). Les résultats des départements où il fait moins de 7,5 % sont stables.
Ce mouvement contradictoire a une double signification. On a d'une part un renforcement de l'électorat Front de Gauche dans les anciennes zones de force du PCF, qui apparaissent plus nettement qu'aux européennes sur la carte. Les marges septentrionales et occidentales du massif central apparaissent ainsi particulièrement renforcées, mais ce mouvement se retrouve également dans le Nord et le Pas-de-Calais. On doit ici noter l'exception de la région parisienne où les résultats sont en baisse par rapport à juin 2009 (voir la carte n°3). Je reviendrai plus en détail sur cette situation dans l'article à venir su l'Ile-de-France.
D'autre part, on constate bien à partir de la carte n°3 (ci-dessous), que le Front de Gauche régresse dans le Sud-Ouest par rapport aux européennes de juin. Cela se traduit dans la baisse du nombre de départements où il dépassait 7,5 %. On peut expliquer ce reflux par l'absence de la candidature de Jean-Luc Mélenchon, qui avait pu en 2009 convaincre des électeurs socialistes et créer une dynamique que l'on a pas retrouvée aux régionales.
L'électorat du Front de Gauche est donc plus identifié et plus concentré géographiquement qu'aux européennes. S'il a perdu chez les anciens socialistes, il a incontestablement progressé dans l'électorat rural protestataire traditionnel.
La carte n°3 représente les fluctuations du vote FdG entre européennes et régionales.
Le cas des trois régions où le FdG se présentait en alliance avec le NPA doit appeler une explication spécifique. Contrairement aux attentes, les résultats n'y sont pas bons, en-dehors du Limousin. Surtout dans l'ensemble des départements concernés le FdG élargi des régionales obtient moins que les votes cumulés du NPA et du FdG aux européennes (5 % contre 8,8 % en Pays-de-la-Loire, 13,13 % contre 16,94 % dans le Limousin). Pire, l'alliance FdG-NPA obtient même moins aux régionales dans le Languedoc que le seul FdG aux européennes : 8,59 % contre 9,15 %auxquels il faut ajouter les 5,78 % du NPA.
Indéniablement, ce résultat doit appeler une réflexion : est-il réellement souhaitable de rechercher l'alliance avec le NPA ? Cette alliance ne présente-t-elle pas le risque d'éloigner une partie de l'électorat du FdG (la plus gestionnaire) et de celui du NPA (la plus radicale) ?
Plus largement, on peut constater que le FdG progresse dans ses zones de force et tend à régresser dans ses zones de plus grande faiblesse où son électorat est plus volatile (Charente-Maritime, Franche-Comté...). Le cas du grand Sud-Ouest (Aquitaine, Midi-Pyrénées) a déjà été évoqué. Dans la Somme et l'Aisne, le recul s'explique par la candidature dissidente de Maxime Gremetz. Enfin, le cas de la côte méditerranéenne et de l'Ile-de-France semble plus inquiétant puisque le FdG y recule, en partie à cause de la montée de l'abstention dans l'électorat populaire. Je développerai tous ces éléments dans plusieurs billets détaillés sur les régions.